Article réédité le 09/03/11
Un poste un peu brouillon et foutraque mais je suis un peu fatiguée avec ce nouveau rythme de vie et je préfère écrire tant que c'est encore chaud.
Bon, je vais clore le chapître boulot avec ce dernier volet sur la partie que j'appréhendais le plus : le travail à la mairie d'Hatsukaichi, soit dans un milieu 100% japonais.
J'y ai fait 2 jours et demi pour le moment, et je vais sûrement encore vous décevoir, mais là-bas aussi tout se passe bien (pourvu que ça dure). Je m'attendais tellement à ce que ce soit l'enfer que du coup je ne suis peut-être plus objective...
Alors, je suis donc au 6ème étage d'un énorme bâtiment avec vue sur la mer et l'île de Miyajima, au sevice Tourisme qui se trouve à côté de ceux de l'Agriculture, de l'Industrie, de la Pêche et autres choses du genre.
C'est beaucoup moins international que le YMCA, même pas du tout : ce matin je monte dans l'ascenseur avec un vieux qui me demande en japonais à quel étage je vais, je lui réponds 6ème, toujours en japonais et là il me fait "shikkusu (six) ne?" avec les 6 doigts pointés en l'air et alors que j'ai déjà appuyé sur le bouton... C'est sûr que ma présence doit un peu surprendre, d'ailleurs au détour d'un couloir j'ai entendu 2 employés s'écrier "Hoo, t'as vu ? c'était une gaijin !! comme ça m'a surpris !!".. Dinnnngue...
L'ambiance est plutôt détendue, bien moins stricte que ce à quoi je m'attendais (peut-être parce que ce sont des fonctionnaires ?), ça papotte, ça rigole, ça se lève pour aller se faire un thé, un café (pour le café, faut aller mettre 40 yens dans la tirelire en forme de pinguin vert et blanc du service Agriculture avant), ça descend à la terrasse fumeur du 3ème étage.
Puis à midi, une cloche avec une mélodie mielleuse du même type que celles qu'on entend dans le Shinkansen, pour ceux qui ont déjà voyagé au Japon, retentit.
Alors la pause du midi, ça semble être sacré, les 2 fois où j'ai continué à toucher mon clavier, même si c'était juste pour enregistrer mon document, on est venu me crier d'un air alarmé "C'EST LA PAUSE DEJEUNER !!!" genre "Attention !! un sort va s'abattre sur nous tous, si tu touches ton ordi après la sonnerie!!!".
Ensuite, assez surprenant la 1ère fois : exctinction des lampes. Bon y a des fenêtres mais ça fait quand même sombre.
Tout le monde mange son bento commandé dans la matinée sur son bureau sans en bouger (ils doivent être habitués, il paraît que ça se passe pareil à l'école), d'autres font la sieste (exactement comme ce que je vous avais décrit ici, d'ailleurs ça se passait aussi dans une mairie).
Y a une petite salle pour aller se faire du thé ou verser de l'eau chaude dans ses cup-ramen, une autre pour la machine à café.
Ensuite, c'est le défilé des brosses-à-dent. C'est pour ça que je disais que ça fait un peu ambiance camping ou soirée pyjama, option on prépare une partie de cache-cache dans le noir. On s'attendrait presque à voir passer quelqu'un avec son roulot de PQ ou proposer une partie de belotte.
La séance brossage de dent semble être le moment idéal pour discuter de manière informelle. J'y ai croisé ma Kachô (chef de service) que je n'avais rencontrée qu'à l'occasion d'une brève présentation avec échanges de cartes de visite et qu'on m'avait décrite comme une femme pas commode et très sévère. Là tout de suite, elle m'a paru bien moins impressionnante,la brosse entre les dents et la mousse de dentifrice autour des lèvres.
Elle m'a posé 2 ou 3 questions sur moi (de quelle ville je viens, depuis combien de temps je suis au Japon, etc...).
Ensuite à 13h, la cloche re-sonne (j'ai l'impression que c'est une mélodie différente), les lumières se rallument et on reprend le travail. Le 1er jour, je n'étais restée que la matinée parce qu'ils faisaient tous "bata-bata" (l'onomatopée qui veut dire qu'on est débordé dans tous les sens) et du coup ils étaient tous un peu ira-ira (énervés), ha bon ?.
L'après-midi, les gens me semblent un peu moins concentrés que le matin, ça papote et ça rigole plus fort.
Mon voisin de bureau, spécialiste des problèmes informatiques il me semble, tête de 1er de la classe ramène des gâteaux et pâtisseries tous les après-midi et en distribue à chacun. C'est aussi lui qui est chargé de la commande des bento et de la récolte de l'argent. ...Quoi ?.. J'ai rien dit, moi, hein !
A 15h, c'est le quart-d'heure aérobique : une musique genre Eurovison 1977 se met en route, une voix de petite mascotte pleine d'espoir et d'entrain conseille aux employés de se détendre et récite une série d'exercices pendant quelques minutes. Ca ne semble pas rencontrer un vif succès, j'ai vu une seule femme les exécuter, et encore, qu'à moitié.
Ensuite à 17h, à nouveau la cloche, celle pour dire qu'on peut commencer à ranger sa trousse et son cahier de textes et terminer ce qu'on est en train de faire (oui, c'est très scolaire en fait) puis une à 17h15 pour dire que c'est vraiment l'heure. Enfin, ça c'est la théorie.
Mon 1er jour j'hésitais un peu à me lever pour partir, mais ma responsable m'a dit que c'était l'heure et que comme j'habitais loin (à 1h) vallait mieux que j'y aille.
Par contre quand s'en vont les autres ? mystère.. j'arrive 1/4 d'heure en avance le matin, ils sont déjà tous installés en train de bosser et à la 2ème cloche du soir, je ne vois personne bouger... peut-être qu'après y a une 3ème sonnerie pour dire qu'on peut aller enfiler son pyjama et installer le campement ?
Le 1er soir, je me suis souvenue de la formule pour dire "Excusez-moi de partir la 1ère" mais en même temps j'ai fait un grand coucou façon Mickey "hé les potes, on s'appelle on se fait une bouffe, give me five !", donc effet qui tombe à l'eau... Au final, depuis j'ai opté pour le bon vieux "O-tsukare sama desu"(on s'est bien fatigué au boulot les gars) qui semble largement suffir.
En parlant du trajet, c'est bien agréable de prendre le tram, il part pile à l'heure et arrive pile à l'heure donc pas de surprise ni de retard. Et comme je monte à l'un des 1ers arrêts, j'ai l'embarras du choix pour m'asseoir et roupiller un peu.
Sinon, ma responsable (je ne sais pas trop comment la désigner, mais en gros c'est à elle que je demande conseil, à qui je rends compte de mon travail, etc..) est très cool : on a pile le même âge (et comme je vous l'ai déjà dit, ici ça crée tout de suite des liens, je pense qu'en plus on est les 2 plus jeunes), elle est dynamique, relax et marrante, enfin très agréable,quoi.
A côté d'elle, est assis un homme qui doit avoir la quarantaine ou un peu moins et avec qui ça semble être la grosse marrade, je sens qu'on va pouvoir former un trio blagues d'ici peu. (Pour l'instant je reste un peu sur mes gardes).
A droite du 1er de la classe se trouve la collègue avec qui je pars aux Etats-Unis et qui a un petit côté bout-en-train elle aussi.
On a d'ailleurs été manger dehors avec elle et ma responsable ce midi, (oui parce que bon, il faut l'avouer, les bento c'est bien gentil mais ça cale pas et ça déprime un peu au bout d'un moment, puis rester assis à son bureau toute la journée n'en parlons pas), et là aussi on s'est bien marré (vous devez commencer à vous dire que je suis vraiment bon public..).
En tout, on est 8 autour de notre table. Et au bout un peu à l'écart, face à nous, se trouve le bureau des maîtresses : notre kachô et celui de la table-ronde voisine.
En fait je me suis vite acclimatée, je n'ai pas ressentie le côté "bizutage" et mal-aise des 1ers jours dans une nouvelle entreprise où on sait pas ce qu'on doit faire, en contre-partie ça déconne moins c'est sûr, mais bon c'est apaisant, les gens sont avenants, ne cherchent pas à vous faire comprendre qu'ils étaient là avant vous et que c'est à votre tour d'en baver, ne cherchent pas à profiter de votre timidité pour prendre le dessus. Je dirais d'ailleurs qu'au Japon, ma timidité joue plutôt en ma faveur.
Je pense que la timidité ne se définit pas de la même manière que chez nous, au Japon, mais c'est une attitude qui donne l'impression plutôt positive qu'on est pas quelqu'un de grossier, pour résumer. En France, j'ai toujours eut l'impression qu'au contraire il fallait montrer qu'on était un "battant" pour pas se faire marcher sur les pieds.
J'ai pas encore bien compris pourquoi mais dans dans certains services les employés sont en costume et tailleur, dans d'autres en espèce de tenue de chantier, des uniformes en tissu vert pâle très épais..
Sinon, niveau boulot, pour l'instant j'ai bossé sur le contenu et la forme du powerpoint qu'on va présenter aux Etats-unis.
Au niveau du contenu je trouvais qu'il manquait des informations primordiales sur les choses à voir à Miyajima (des choses pourtant susceptibles de plaire aux touristes étrangers et de les attirer), et qu'il en présentait d'autres comme si tout le monde connaissait. J'ai donc complété un peu, rédigé ces parties en anglais et les ai données à vérifier aux profs d'anglais du YMCA.
Ensuite la forme, c'était là où il y avait le plus gros boulot à faire. Leur powerpoint était d'une laideur indescriptible.
Avec une présentation pareille, je pense qu'on était parti pour définitivement couper toute envie à qui que ce soit de choisir Hiroshima et Miyajima comme destinations de vacances : Des photos mal choisies, mal cadrées, avec des effets floutés immondes sur les bords, des effets ombrés tout aussi hideux, les typos pas mieux, la mise en page MonDieu !, pas pro du tout, bref avec un site qui se vante d'être l'un des 3 plus beaux du Japon, ils étaient parvenu à faire la présentation la plus moche du monde.
J'ai pas fait un truc de dingue, mais quelque chose de propre et qui donne envie, qui met la beauté du site en avant, qui joue sur le côté japonais (les lieux écrits aussi en kanji avec une typo caligraphiée ça donne une petite touche exotique), et ils ont vraiment été surpris et contents du résultat. Ils se demandent juste s'ils feraient mieux de ne pas le montrer à celui qui avait crée l'ancien powerpoint de peur de lui faire honte.
Sinon j'ai été choisir un ordinateur portable au Deo-Deo du coin avec mon voisin de bureau, ça c'était la petite sortie fun Ouai on peut faire craquer les cours quelques minutes, comme quand on accompagne quelqu'un à l'infirmerie, ça n'a pas été la franche déconnade non plus, hein. J'ai hâte parce que pour l'instant je suis obligée de me servir de mon iPhone pour me connecter à internet, puis bosser sur des ordis empruntés c'est pas très confortable. En plus je pourrai l'emmener aussi au YMCA, où j'utilise pour l'instant celui de mon patron qui m'a demandé de ne pas trop fouiller dans ses dossiers parce que je risquais de tomber sur des choses louches (?!).
Je sers aussi ponctuellement de conseillère en gaijinologie :
"Et les paquets de mouchoir, tu penses que ça peut leur faire plaisir aux américains ?"
"Ben ça dépend, si ça fait un peu japonais, qu'y a des jolis kanjis ou de belles illustrations, moi j'en avais ramené la 1ère fois"
"Super ! Ceux-là, alors, ils sont comment ?"
"...O_o'".... là heureusement un collègue m'a sauvé la vie "nan mais les étrangers, ils trouvent nos mouchoirs trop mous et trop fins"
"Et les cartes postales ? c'est bien les cartes postales ?"
"Oui, oui c'est bien les cartes postales"
"Non, elles font pas la même taille en Amérique, elles sont plus grandes" d'après le spécialiste des goûts des étrangers en matière de mouchoir.
"Et sinon, en France vous vous préoccuper des histoires de groupe sanguin ?" (je l'attendais pas si vite le coup des groupes sanguins..)
Toujours le monsieur je-sais-tout : "Mais non ! y a que chez nous au Japon !"
Voilà, je pense avoir fait le tour en ce qui concerne mes nouveaux terrains de jeu, même si je ne suis pas à l'abri de vous raconter de nouvelles anécdotes au cours des mois qui viennent.